êtes-vous une personne créative ? 

 

 

La rencontre du club innovation Curiosity du 8 juillet 2025 était dédié à la créativité.

 

Définition floue, entourée de mythes populaires, cette notion pourtant cruciale en innovation méritait bien qu’on s’y attarde une après-midi.

 

Pour l’occasion, le club Curiosity s’est invité dans un lieu créatif par sa forme et sa fonction, le théâtre flottant de L’île Ô à Lyon. Structure unique sur les plans architectural et technique, il accueille depuis 2023 un projet artistique, événementiel, citoyen et éducatif dédié prioritairement à l’éveil et à la formation des jeunes et des enfants au théâtre.

 

Après une présentation de cette structure, nous avons eu la chance de recevoir des témoignages d’experts pour qui la créativité fait partie du quotidien :

 

  • Anne-Sophie AUDOUX, Responsable Créa’lab & Perfomance RID chez NTN
  • Arnaud RAGOT, Game Director chez UBISOFT
  • Cyprien TOURTE, Designer de l’Ecole supérieur d’Art de Design de Saint-Etienne
  • Sandrine CASTAN, responsable prospective chez Spark Lab
  • Sarah PEREZ, Co-fondatrice de Cognidia et ingénieure en sciences cognitives

 

 

 

Êtes-vous une personne créative ? Et si oui, pouvez-vous le prouver ?

 

La réponse à ces questions n’est pas évidente.

Est-ce qu’un pianiste est créatif car il faut l’être pour jouer de la musique ? Ou est-ce qu’il ne l’est pas car il se contente d’interpréter une partition ?

Ces questions pourraient sembler tout droit sorties du baccalauréat de philosophie, et sans grand intérêts pratiques. Mais quand l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) décide de lancer une vaste initiative pour soutenir l’apprentissage de la créativité dans les états membres, on commence à se dire que créativité et économie ne sont peut-être pas si éloignées.

 

Pour certains secteurs comme le cinéma ou la décoration d’intérieur, ce lien peut paraître évident, mais de nombreuses industries se mettent également à rechercher ou cultiver cette compétence, notamment au sein des départements innovation en charge de la nouveauté et du changement. Alors aujourd’hui, pour notre dernier club Curiosity de l’année, nous avons décidé de tirer cette affaire au clair !

 

Vous retrouverez dans cet article l’essentiel pour comprendre ce qu’est la créativité, à quoi sert-elle, et comment la cultiver en entreprise.

 

Bonne lecture!

 

 

 

 

 

 

 

La créativité : qu’est-ce que cela signifie ?

Première étape quand on veut parler de créativité, se mettre d’accord sur le sens de ce mot. Quand on cherche sur Internet, on la définit souvent par ses synonymes : imagination, inventivité, pouvoir de création. Mais cela n’apporte que peu de clarification et, surtout, ces définitions ne rendent pas compte de la complexité du processus de créativité. Car la pensée créative fait intervenir toutes les capacités cognitives de notre cerveau : mémoire, logique, flexibilité…

 

Voilà sans doute la raison pour laquelle Sarah Perez a commencé sa conférence en nous donnant une définition plus scientifique de la créativité.

 

 

La créativité et le cerveau : Qu’en disent les sciences cognitives ?

 

 

En sciences cognitives, la créativité est définie comme « processus de pensée qui permet de produire une idée nouvelle et adaptée au contexte ».

 

Dans cette définition, on retrouve deux composantes essentielles pour qu’une idée soit créative : la nouveauté et l’adéquation avec son environnement. Et ces deux notions renvoient au processus même de créativité, qui peut se décomposer en deux phases. 

 

1. La phase de divergence

 

La créativité commence par une étape nommée la phase de divergence. Pendant celle-ci, l’esprit génère une multitude d’idées et de solutions possibles à partir d’un point de départ par analogie, association, mémoire… sans se soucier de leur vraisemblance.

 

2. La phase de convergence

 

Pour exprimer une réponse, la divergence est suivie d’une phase de convergence. Il s’agit d’un processus analytique pendant lequel les idées sont évaluées et sélectionnées pour ne conserver que les meilleures solutions, celles les mieux adaptées au contexte. Elles seront ensuite formulées et exprimées.

 

3. Deux phases complémentaires

 

La créativité naît de l’alternance de ces deux phases qui ne peuvent exister l’une sans l’autre. Sans curiosité ni inspiration, il est difficile de sortir des sentiers battus pour générer des idées. Mais sans logique ni connaissance d’un domaine, il n’est pas possible de saisir le contexte dans lequel s’inscrit un problème, et donc, pas de convergence possible. L’excellente nouvelle, c’est que cela signifie que la créativité n’est pas un don, mais quelque chose qui s’apprend, se pratique et s’entraîne.

Schéma :

 

 

Pourquoi développer la créativité en entreprise ?

 

                  La créativité est souvent associée aux domaines artistiques (peinture, musique…) ou abstraits (mathématiques…). On peut donc légitimement se demander s’il est nécessaire pour une entreprise de faire preuve de créativité, et si oui, quels postes sont les plus susceptibles de bénéficier de cette compétence.

 

                  Pour répondre à ces domaines, nous avons eu la chance d’assister à une table ronde regroupant Anne-Sophie AUDOUX, de chez NTN (fabrication de roulements mécaniques et de pièces mécaniques de haute précision), et de Arnaud RAGOT, Game Director chez UBISOFT. Et leur réponse est unanime et assez simple, la créativité est utile partout, tout le temps et s’adresse à tout le monde.

La créativité est un couteau-suisse

                  Premièrement, la créativité adresse un éventail infini de problèmes, qu’ils soient externes (R&D, marketing…) ou internes (RH, finance…). Anne-Sophie AUDOUX dirige le Créa’lab de son entreprise et expliquait que les projets créatifs apparaissent spontanément dans tous les départements. Si ceux-ci semblent pouvoir créer de la valeur pour l’entreprise, le lab s’occupe alors d’accompagner le porteur de projet. Et les sujets traités sont aussi variés que le développement d’une nouvelle famille de roulement conçue pour améliorer l’étanchéité, ou la conception de services innovants autour des nouvelles mobilités.

La créativité revêt de nombreuses formes

 

                  Ensuite, la créativité est polymorphe. Elle doit en effet accompagner un projet de tout au long de sa vie, mais sous des formes adaptées à chaque étape. Dans le domaine du jeu vidéo, il peut paraître évident que la créativité intervienne lors du lancement d’un nouveau projet. En effet, le jeu devra se démarquer de la concurrence par sa direction artistique, ses mécaniques de jeu, ou encore sa trame narrative. Mais la créativité n’en est pas moins essentielle durant tout le reste de son développement, que ce soit pour lever des contraintes techniques à travers des lignes de codes, ou en réfléchissant aux interfaces que va utiliser le joueur.

 

               

 La question ne devient alors plus, est-ce que la créativité génère de la valeur en entreprise ? Mais plutôt, comment faire pour que les bons profils sachent utiliser la créativité adaptée au moment opportun ?

Comment cultiver la créativité ?

 

                  Arnaud RAGOT, durant son intervention, a comparé la créativité à un muscle qu’il faut entraîner par la pratique. Et comme tout bon sportif le sait, pratiquer nécessite à la fois le bon contexte, et le bon matériel.

 

1 – Créer une culture adéquate

                 

La première chose à avoir, pour que la créativité puisse éclore, est un contexte où elle puisse s’épanouir. Pour cela, il faut être capable de créer un environnement dans lequel les collaborateurs ont le droit de tenter, de rater, de proposer et de se tromper, en toute confiance et sécurité. Evidemment, cette culture doit diffuser petit à petit dans l’entreprise. Il s’agit d’un véritable travail de jardinier consistant à semer les bonnes pratiques, et à rester attentifs aux signaux et aux initiatives pour les protéger et encourager.

Il est parfois bon d’avoir un lieu dédié à la créativité comme le Créa’lab de NTN, ou le Michelin Innovation Lab. En délimitant cet espace, il est possible de créer les conditions dans lesquelles les collaborateurs pourront s’exprimer, apprendre et tester sans risque.

 

2 – Se mettre dans les bonnes conditions

 

                  La créativité est un processus qui peut prendre du temps. Heureusement, il existe de nombreuses méthodes pour la stimuler et la cadrer. Sarah PEREZ les regroupe en 4 catégories.

 

  • S’inspirer et s’immerger: Pour mieux répondre à un problème, il est essentiel de le comprendre, mais aussi de s’en extraire pour prendre du recul. L’inspiration comme l’immersion peuvent prendre des formes très variées allant du vis-ma-vie (passer plusieurs jours dans le quotidien de sa cible), à simplement un brainstorming avec des personnes totalement extérieurs aux problèmes pour y apporter un regard neuf.

 

  • Casser les routines: Les routines créent des automatismes, et les automatismes deviennent des habitudes. Tout le contraire de ce que l’on cherche à avoir en phase de divergence. Casser la routine peut vouloir dire changer de groupe, de salles, ou tester des nouvelles techniques de créativité. Pourquoi ne pas essayer pendant votre prochain atelier une des nombreuses techniques approuvées par les Sparkies ? 

 

  • Se mettre une contrainte de temps: Sans limite temporelle, il est difficile pour l’esprit de savoir à quel moment il doit rentrer en phase de convergence. Voilà pourquoi nous avons souvent l’impression d’être plus productif à la fin d’un atelier qu’au début.

 

 

  • Utiliser des jeux de rôle: Notre quotidien est rempli de certitude et d’habitude que nous ne contestons plus. Poser un autre décor et se donner un rôle sont l’occasion parfaite de faire table rase et de se débarrasser des présupposés.

 

3 – Pour aller, voir et viser plus loin…

                  Toutes les techniques dont nous avons parlé sont très bonnes pour se projeter à court terme. Mais certaines industries (santé, énergie…) lancent des projets qui n’aboutiront que dans 15 ou 20 ans. Il faut alors des outils adaptés pour réussir à s’extraire de notre présent, et à se projeter dans ce futur. Et cela était justement le sujet de la table ronde entre Sandrine CASTAN et Cyprien TOURTE.

 

La prospective ou comment penser des futurs désirables ?

                  La première nous a parlé de la démarche prospective. Cette démarche consiste à se projeter dans plusieurs avenirs possibles à l’aide de scénarios basés sur des faits réels et présents. Ces scénarios pourront faire naître des réflexions autour de la raison d’être de l’entreprise, ou de sa capacité à se renouveler face aux changements brutaux à venir, pour finalement agir dès aujourd’hui. 

Pour plus d’informations, nous vous renvoyons à notre article sur le sujet.

Le design fiction ou comment incarner ces futurs désirables ?

                  Le second nous a parlé de sa pratique du design fiction. Cette démarche consiste à donner physiquement vie à un futur alternatif, pour inspirer et questionner nos pratiques. Par exemple, en se basant sur sa phobie de l’eau, Cyprien invente un monde où les terres seraient immergées, forçant l’humanité à se réinventer en espèce sous-marine. Il explore alors notre rapport à la technologie en créant des combinaisons néoprènes futuristes, mais aussi au sacré en imaginant de nouveaux rites funéraires.

                  Dans ces deux approches, la finalité n’est donc pas tant de nous faire réfléchir sur les futurs alternatifs, mais davantage sur ceux que nous souhaitons voir se produire. A quoi ressemblent ils ? Et comment tout mettre en œuvre pour les atteindre ?

 

3 exercices de créativité pour pratiquer et oser se lancer !

 

Parler créativité, c’est une chose, mais le plus dur, c’est toujours de se lancer. Alors, comme dans chaque Curiosity, nous avons tenu à engager nos participants en les faisant prendre part activement à cette journée, au travers de 3 exercices de créativité.

 

1 – La frise des O

 

                  La frise des O est un bon exercice d’échauffement de l’esprit. A chacun de nos participants, nous avons demandé de remplir un O comme ils le souhaitaient. On se rend alors vite compte que de cette très simple consigne vont naître 100 idées différentes en fonction des métiers, des compétences de dessins, de l’inspiration, ou même des représentations adjacentes.

2 – Le test de Torrance : mesurer sa créativité

 

                  En se basant sur les travaux du chercheur E.P. Torrance, nous avons proposé un test aux participants visant à définir leur score de créativité. L’exercice est, en apparence, facile. Vous avez 10 minutes pour trouver un maximum d’usages différents à une boîte de carton.

                  En fonction de vos réponses, et de celle du groupe qui vous entoure, seront alors définis 3 scores :

  • Votre fluidité : Score basé sur le nombre d’idées émises (faire une table, utiliser comme frisbee…)
  • Votre flexibilité : Score basé sur le nombre de catégories adressées par vos différentes idées (mobilier, décoration…)
  • Votre originalité : Score basé sur la fréquence d’apparition de vos idées au sein du groupe (plus une réponse est unique, plus son score est élevé)

 

Ces scores ont pour vocation de mieux se connaître, et de savoir sur quels axes progresser pour devenir plus créatifs. Ainsi, nos participants ont pu être classés en 4 catégories en fonction de leurs axes de progressions.

3 – Les pièces de théâtre

 

                  Finalement, clou du spectacle et de la journée, nous avons décidé d’exploiter un maximum notre lieu d’accueil en poussant nos participants à grimper sur scène. Chaque groupe de 7 personnes a ainsi eu 1 h 15 pour s’approprier une thématique, puis la retranscrire en une saynète de théâtre de 5 minutes, à jouer devant tous les autres participants. Habilement épaulés par Alban MARICAL, comédien et metteur en scène, toutes et tous se sont prêtés au jeu avec beaucoup de courage et, vous l’aurez deviné, de créativité. Ainsi, nous avons eu le droit d’assister à :

 

  • Une entreprise qui se repense grâce au vivant pour sauver ses employées de l’épuisement
  • Un couple perdu sur une île déserte qui se marie grâce à l’effectuation
  • Un voyage temporel à la recherche d’un jouet issu de l’économie régénérative
  • Une session de pitch d’intrapreneurs cherchant à construire un bateau théâtre en béton
  • Les premiers jours d’une manager innovation avec son lot de bonnes et mauvaises surprises
  • Le montage d’une exposition d’art contemporain collaborative dans une piscine pour nous parler de culture innovation
  • Une réunion dans le bar de l’ancien patron de Kodak regrettant d’avoir séché les cours de prospective
  • Maya l’abeille cherchant le champ de fleurs avec la meilleure innovation managériale pour s’y installer

 

Cette performance créative et artistique a ensuite laissé place à l’habituel cocktail de clôture qui, 10 ans oblige, s’était doté d’un certains nombres de gâteau. La rumeur veut que les Sparkies en ait même mangé chaque midi pendant 1 semaine après ce soir-là.

 

Boostés de cette énergie collective, les SPARKIES ont pu finir l’année enrichis et profiter de l’été pour se reposer !

 

Nous avons hâte de vous retrouver pour cette rentrée, et restez connectés nous n’avons pas fini de vous faire innover.

Toute l’équipe Spark Lab vous remercie pour votre lecture : Nous sommes passionné.e.s par l’effectuation, le design thinking, l’innovation et les liens qui sont tissés par cet environnement !